Fiche descriptive : Phytoremédiation des composés organiques

De : Services publics et Approvisionnement Canada

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Description

La phytoremédiation consiste en l’utilisation de plantes pour réhabiliter ou contenir des contaminants dans différents médias tels que le sol, les boues, les sédiments, l’eau souterraine, l’eau de surface ou l’eau usée. Pour ce faire, plusieurs mécanismes peuvent être utilisés dépendamment du type de contaminant et de médium contaminé. Selon les conditions du site, la phytoremédiation peut être une technique efficace et économiquement avantageuse pour le traitement de contaminants inorganiques et biodisponibles. Cependant, cette technique requiert une superficie considérable et des durées de traitement relativement longues.

La phytoremédiation des composés organiques fait surtout intervenir trois mécanismes : la phytodégradation, la biodégradation dans la rhizosphère et la phytovolatilisation.

La phytodégradation (ou phytotransformation) consiste en l’absorption et la transformation ou métabolisation de composés organiques dans les tissus végétaux (c’est-à-dire les racines, feuilles et tiges). Des composés synthétisés par la plante tels que des enzymes sécrétées par les racines ou par d’autres tissus peuvent également jouer un rôle dans la phytodégradation. Les contaminants cibles incluent les solvants chlorés, herbicides, insecticides, pentachlorophénol (PCP), bisphényls polychlorés (BPC) ou des constituants de munitions.

La rhizodégradation (ou phytostimulation) se produit grâce aux substances produites naturellement par les racines (par exemple, les sucres, acides aminés, acides organiques, facteurs de croissance, etc.) qui favorisent la croissance microbienne dans la rhizosphère, la région immédiate entourant les racines. Ainsi, les microorganismes (levures, champignons ou bactéries) peuvent digérer des composés organiques dans la rhizosphère (par exemple, les carburants et les solvants). La croissance des racines favorise la croissance des microorganismes également par la création de canaux et de chemins préférentiels qui facilitent l’aération du sol et le transport de l’eau dans la rhizosphère. Ce mécanisme de phytoremédiation est un processus bien plus lent que la phytodégradation. Les contaminants cibles incluent les hydrocarbures pétroliers, BTEX, HAP, pesticides, solvants chlorés, PCP et BPC.

Par la phytovolatilisation, certains contaminants organiques hydrophiles peuvent être absorbés par les racines. Ces composés sont par la suite relâchés dans l’atmosphère au niveau des feuilles par transpiration. Le contaminant peut être relâché sous sa forme originale ou après avoir subi une transformation. Les contaminants cibles incluent les composés organiques volatils comme la gazoline et le trichloroéthylène.

Liens internet :

Mise en œuvre de la technologie

Le principal enjeu de la phytoremédiation consiste à choisir les plantes appropriées compte tenu de la nature des contaminants, des facteurs climatiques et des conditions des sols et des eaux souterraines. Un essai pilote peut être requis pour vérifier l’efficacité des espèces sélectionnées. Un autre aspect à considérer est l’impact écologique de l’introduction d’une nouvelle espèce végétale dans un environnement potentiellement sensible.

Les projets peuvent inclure :

  • Des restrictions d’accès au site à l’aide de clôtures et des panneaux
  • Une caractérisation de site détaillée comprenant les conditions climatiques et la profondeur de la contamination, un inventaire de la végétation présente et la prise en considération de l’échéancier de réhabilitation
  • L’examen des études et des bases de données existantes pour la sélection des végétaux
  • Une étude en laboratoire ou un essai pilote en utilisant les végétaux choisis
  • Conception à pleine échelle et mise en œuvre :
    • Dessins et cartes des aménagements finaux
    • Préparation du sol (labourage, fertilisation et plantation)
    • Planification du système d’irrigation. Un approvisionnement en eau peut être requis sur le site ou à proximité dépendamment des besoins des plantes et des conditions climatiques
    • Dispositifs de suivi/puits
    • Entretien du site :
    • Irrigation et fertilisation
    • Contrôle des mauvaises herbes et des ravageurs
    • Le suivi de la croissance et de la performance de réhabilitation :
      • Échantillonnage et analyse du sol et de l’eau souterraine
      • Échantillonnage et analyse des tissus végétaux
      • Échantillonnage et analyse des gaz de transpiration
  • Tonte, taille, récolte (la manutention et disposition du matériel végétal ne sont généralement pas nécessaires avec les composés organiques)

Pour les sites à superficie importante, de l’équipement agricole et/ou spécialisé peut être nécessaire pour l’installation et l’entretien.

Matériaux et entreposage

Les besoins de stockage de matériaux sont assez minimes.

  • Semences ou semis de plantes/arbres
  • Engrais et autres amendements
  • Eau pour irrigation : peut être entreposée sur le site si l’approvisionnement n’est pas disponible au site. Dépendamment de la taille du projet et du climat, de grandes quantités d’eau peuvent devoir être requises

Résidus et rejets

Les plantes ne sont pas récoltées pour en retirer les contaminants étant donné que ceux-ci sont dégradés ou volatilisés par les plantes. Cependant, si les plantes sont coupées pour des raisons autres (comme l’entretien), elles pourraient contenir des contaminants accumulés. Une vérification de la présence de contaminants peut être effectuée. Si les concentrations de contaminants dans les tissus végétaux excèdent les critères applicables, le matériel végétal taillé ou la litière devront être traités comme des déchets dangereux et être disposés dans un site de disposition approprié. L’incinération ou le compostage peut être considéré pour réduire le volume et la masse de matériel qui devra être géré.

Le processus de phytovolatilisation peut transférer des contaminants du sol vers l’atmosphère par les feuilles pendant la transpiration.

Si des engrais ou autres amendements sont utilisés, le potentiel de contamination de l’eau de ruissellement de surface ou de l’eau souterraine par les amendements doit être considéré dans la conception du projet. L’utilisation excessive d’engrais ou d’amendements peut se traduire par des changements de pH ou la création de composés organiques métalliques solubles pouvant entraîner la mobilisation de contaminants.

Analyses recommandées dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Analyses chimiques

  • pH
  • La teneur en matière organique
  • La concentration des métaux
  • La concentration des contaminants présents dans les phases :
    • adsorbées
    • dissoutes
    • libres
  • La concentration des nutriments incluant :
    • l'azote ammoniacal
    • l'azote total Kjeldahl
    • les nitrates
    • les nitrites
    • le phosphore total
  • La salinité/conductivité

Analyses physiques

  • La teneur en eau du sol
  • L'analyse granulométrique
  • L'évaluation biologiques et des facteurs écologiques

Essais recommandés dans le cadre d’une caractérisation détaillée

Essais biologiques

  • Essai de toxicité – Germination
  • Essai de toxicité – Élongation des racines
  • Essais en serre

Autre information recommandée pour une caractérisation détaillée

Phase II

  • La profondeur et l'étendue de la contamination
  • La présence de récepteurs :
    • la présence de récepteurs potentiels
    • la présence d'infrastructures de surface et souterraines
    • le risque de migration hors site

Phase III

  • La stratigraphie du sol
  • Une modélisation hydrogéologique
  • La connaissance détaillée de la géologie et de l'hydrogéologie incluant :
    • la direction d'écoulement des eaux souterraines
    • la conductivité hydraulique
    • les fluctuations saisonnières
    • le gradient hydraulique

Applications

  • Permet de traiter la contamination organique située dans le sol, les sédiments, l’eau de surface et l’eau souterraine
  • La contamination résiduelle doit être située près de la surface (< 1 m) ou dans la zone de croissance du système racinaire végétal
  • Si l’eau contaminée se situe en profondeur, celle-ci peut cependant être pompée et des plantes peuvent être utilisées pour la traiter)
  • La phytoremédiation peut être utilisée sur de vastes superficies
  • Ces mécanismes peuvent être utilisés afin de créer des barrières pour les contaminants dans l’eau souterraine

Applications aux sites en milieu nordique

Lors du choix des végétaux, il faut tenir compte de leur croissance dans des conditions climatiques particulières comme le froid et les courtes saisons de croissance en milieu nordique. La sensibilité écologique des environnements nordiques et éloignés doit aussi être considérée lors de l’évaluation de l’utilisation de la phytoremédiation, particulièrement si l’utilisation d’espèces non indigènes est prévue. Il faut de plus considérer que cette technique peut attirer les oiseaux et autres animaux qui pourraient être nuisibles à certains sites, par exemple au milieu aéroportuaire. L’entretien et l’irrigation peuvent être difficiles dans certaines régions éloignées. Les espèces devraient être choisies en favorisant des besoins en entretien et en irrigation minimes.

Type de traitement

Type de traitement
Type de traitementS’applique ou Ne s’applique pas
In situ
S’applique
Ex situ
Ne s’applique pas
Biologique
S’applique
Chimique
S’applique
Contamination dissoute
S’applique
Contamination résiduelle
S’applique
Contrôle
S’applique
Phase libre
Ne s’applique pas
Physique
S’applique
Résorption
S’applique
Thermique
Ne s’applique pas

État de la technologie

État de la technologie
État de la technologieExiste ou N'existe pas
Démonstration
N'existe pas
Commercialisation
Existe

Contaminants ciblés

Contaminants ciblés
Contaminants ciblésS'applique, Ne s'applique pas ou Avec restrictions
Biphényles polychlorés
S'applique
Chlorobenzène
Avec restrictions
Composés inorganiques non métalliques
Ne s'applique pas
Composés phénoliques
S'applique
Explosifs
S'applique
Hydrocarbures aliphatiques chlorés
Avec restrictions
Hydrocarbures aromatiques monocycliques
S'applique
Hydrocarbures aromatiques polycycliques
S'applique
Hydrocarbures pétroliers
S'applique
Métaux
Ne s'applique pas
Pesticides
S'applique

Remarques:

Cette technique ne s’applique pas pour les hydrocarbures aliphatiques chlorés possédant 4 à 5 atomes de chlore. Généralement, les composés organiques ayant un log de coefficient de partage octanol/eau (log Kow) entre 0,5 et 0,3 sont plus facilement absorbés par la plante et leur translocation à travers les tissus est facilitée.

Durée du traitement

Durée du traitement
Durée du traitementS’applique ou Ne s’applique pas
Moins de 1 an
Ne s’applique pas
1 à 3 ans
Ne s’applique pas
3 à 5 ans
Ne s’applique pas
Plus de 5 ans
S’applique

Remarques :

Cette technique ne s'applique pas pour les hydrocarbures aliphatiques chlorés possédant 4 à 5 atomes de chlore. Généralement, les composés organiques ayant un log Kow entre 0.5 et 0.3 sont plus facilement absorbés par la plante et leur translocation à travers les tissus est facilitée.

Considérations à long terme (à la suite des travaux d'assainissement)

Il n’y a pas de considérations particulières à long terme à l’exception que le système végétal mis en place puisse nécessiter de l’entretien ou doive être retiré.

Produits secondaires ou métabolites

Généralement, la phytoremédiation de composés organique ne génère pas de produits ou métabolites secondaires nocifs. Cependant, certains contaminants peuvent être transformés par les microorganismes de la rhizosphère et peuvent générer des métabolites qui sont plus toxiques que le composé initial. Par exemple, la transformation bactérienne du trichloroéthylène et du dichloroéthylène peut produire du chlorure de vinyle.

Limitations et effets indésirables de la technologie

  • La profondeur de la contamination doit être limitée puisque la zone de traitement est déterminée par la profondeur de pénétration des racines dans le sol (moins d’un (1) mètre de la surface pour le sol et moins de trois (3) mètres l’eau souterraine). L’utilisation d’arbres permet le traitement de contamination située plus en profondeur
  • Le traitement s’effectue sur plusieurs années (plus de cinq ans)
  • Une concentration de contaminants élevée peut avoir un effet toxique sur les plantes ;
  • La croissance des végétaux est limitée par la situation géographique (climat/saison) et les caractéristiques du sol
  • La présence de bâtiments ou d’infrastructures souterraines peut interférer avec la plantation ou l’empêcher et ainsi exclure cette technologie des options à envisager
  • Les contaminants ne sont pas toujours traités et peuvent être transférés d’un médium à un autre (comme du sol à l’air lors de la phytovolatilisation)
  • Cette technologie peut seulement être appliquée aux sites sur lesquels le risque généré est faible pour la santé humaine et de l’environnement, par exemple où les longues périodes de réhabilitation sont possibles et où la bioconcentration de contaminants toxiques dans les plantes ne présente pas un facteur de risque important
  • L’irrigation peut affecter l’écoulement de l’eau souterraine et le déplacement hydraulique
  • De nouvelles voies de transport qui affectent la mobilité des contaminants peuvent être créées (comme par l’ajout d’amendement ou par les méthodes de culture)
  • L’analyse des tissus végétaux peut être nécessaire avant la disposition de tout matériel potentiellement contaminé
  • Des moyens de contrôle peuvent devoir être utilisés afin de restreindre l’accès au site
  • Peut exiger une grande surface
  • Il y a des risques pour la chaîne alimentaire si les végétaux sont consommés par la faune (bioaccumulation)

Technologies complémentaires améliorant l’efficacité du traitement

Une fertilisation riche en azote stimule la croissance des plantes, l’activité microbienne et le taux de dégradation des contaminants.

Traitements secondaires requis

Aucun.

Exemples d'application

La phytoremédiation des composés organiques est une technique qui a démontré son efficacité sur plusieurs sites.

Les sites suivants fournissent des exemples d’application 

Performance

Le temps nécessaire à la restauration d’un site par phytoremediation est variable et est fonction à la fois du contaminant, des plantes sélectionnées, de la population et de l’activité bactérienne la rhizosphère ainsi que des propriétés physico-chimiques du milieu.

Mesures pour améliorer la durabilité de la technologie et/ou favoriser l’assainissement écologique

  • Optimisation des apports d’engrais et d’eau en fonction des besoins particuliers des végétaux, des études portant sur les éléments nutritifs du sol et des systèmes d’irrigation goutte à goutte
  • Examen des moyens permettant d’optimiser les programmes d’entretien et de surveillance comme les systèmes d’irrigation automatiques jumelés à la télémétrie (par exemple, l’humidité du sol)
  • Faire preuve de vigilance en matière de biosécurité en prenant les mesures de protection appropriées, et en respectant toutes les règles d’utilisation des végétaux génétiquement modifiés (transgéniques), notamment en ce qui a trait aux méthodes de culture, à l’enracinement, à la floraison, etc.

Impacts potentiels de l'application de la technologie sur la santé humaine

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Références

Auteur et mise à jour

Fiche rédigée par : Magalie Turgeon, Conseil national de recherches

Mise à jour par : Jennifer Holdner, M.Sc., Travaux publics et Services gouvernementaux Canada

Date de mise à jour : 1 mars 2015

Dernière mise à jour par : Marianne Brien, P.Eng., Christian Gosselin, P.Eng., M.Eng., Golder Associés Ltée

Date de mise à jour : 31 mars 2018

Version :
1.2.5